Le retour s'est bien passé. Il se sent toujours mieux quand ils reviennent à la maison. Plus besoin de se méfier de tout et de tous. Plus besoin de laisser un grognement sourd lui déchirer la gorge pour inciter les passants à s'éloigner. En plus... Un nouveau sourire lui échappa. Il allait vraiment adorer cette soirée.

Il arrive devant l'immeuble, tape le code, pousse la première porte, sort son badge, pousse la deuxième porte, salue le gardien de nuit, franchit la troisième. Prend l'ascenseur, un bras toujours enroulé autour de la taille de Bunny. Introduit sa clef dans la serrure, pour atteindre leur étage, le dernier. Il repousse les souvenirs. Il n'a pas fait ça depuis longtemps. Mardi Gras. Il se rappelle les esclaves, la belle époque, la Nouvelle-Orléans. Il avait aimé ça, en un sens, parce qu'il savait que ce n'était qu'une fois l'an. C'était une récompense. Et une torture. Doucement, il fit tourner le lapin, plaqua son dos contre lui, tenu par un de ses bras.

L'autre main remonte, se sert autour de la mâchoire fragile, le force à regarder leurs reflets. Puis se penche sur lui, lui murmure à l'oreille, cruel, tentateur, brûlant.

"On entame un nouveau jeu ce soir. Je reste Lavighjju, tu restes Bunny. Mais quand nous aurons franchi cette porte, je ne serai plus le Maître. Si tu désires que rien ne se passe, rien ne se passera. Si tu souhaites que je fasse quelque chose, je le ferai, mais il faudra me dire quand et comment. Je ne retirerai aucun vêtement que tu ne me diras pas d'enlever. Je ne ferai pas un bruit que tu ne m'ordonneras pas de laisser échapper. Est-ce que tu comprends les règles, Bunny? Bien, très bien... Alors, que le jeu commence... Et ne prenne fin qu'au coucher du soleil."

Dans un geste grandiloquent, il lâche le lapin. Non, pardon, le Lapin. Le Maître pour la soirée. Il bloque la porte. Et attend, la tête baissée, retenant un sourire. Oh oui, il allait vraiment détester ça...

Dans l'ascenseur, Lavi se plaque contre lui, dans son dos, le maintient d'un seul bras. Bunny sent la chaleur de Lavi contre lui. Lavi n'est pas toujours chaud. Mais là oui. Bunny aime bien. Sa respiration s'accélère légèrement. Il comprend que Lavi a un nouveau jeu. Bunny attend, presque impatient. Son oreille s'agite sous le murmure de Lavi.

Bunny est perdu. Il ne comprend pas ce jeu. Bunny n'est pas le Maître. Que faire ? Machinalement, il attrape la main de Lavi et entre dans l'appartement. Là, il peut retirer son foulard. Il se sent déjà un peu mieux. Ses oreilles s'agitent. Se redressent, se rabaissent, l'une après l'autre. Indécis. Que faire ? Il observe l'appartement dépouillé. Sa main vient toucher le collier autour de son cou, qu'il n'a jamais retiré depuis que Lavi lui a mis.

Bunny n'est pas le Maître. Mais Lavi a dit que Bunny est le Maître. Alors Bunny doit être le Maître, pour obéir à Lavi. Mais il ne peut pas. À moins que... Peut-être ? Il observe l'appartement dépouillé. Il lui semble... différent. Il se retourne vers Lavi. Lavi n'est pas le Maître. Ce soir. Lavi est à lui. Bunny tend la main vers lui, lui fait signe d'approche. Et Lavi avance. Incrédulité. Il se serre contre lui. Bunny tire sur le col de Lavi. Lavi se penche. Jubilation. Lavi est à lui.

Alors Bunny embrasse Lavi. D'abord timidement, comme s'il demandait la permission. Comme il en a l'habitude. Et puis l'idée commence à s'ancrer. Lavi est à lui. Alors Bunny embrasse Lavi comme il a l'habitude que Lavi embrasse Bunny. Sauvagement, violemment, à pleine bouche, avec les dents. Serré contre lui comme il l'est, Bunny sent qu'il ne laisse pas Lavi indifférent.

Bunny se détache de Lavi. Il sourit. Il recule, se dirige vers la chambre sans quitter Lavi du regard. Désir. Il murmure. Viens. Arrivés dans la chambre, il fait asseoir Lavi sur le lit. Pour le moment, il ne réfléchit pas encore aux possibilités. Pas encore. Pour le moment, les souvenirs de leur sortie sont encore vivace, et il se souvient d'une envie qu'il a eu, qu'il décide d'assouvir. Un petit désir de rien du tout. Mais il faut bien commencer quelque part.

Il ôte le pull de Lavi, et s'installe à califourchon sur ses genoux. Comme il avait voulu le faire, sur le banc. Il enfouit son visage dans son cou, respire son odeur. À lui. Ses oreilles s'agitent, l'une d'entre elle papillone sur le visage de Lavi. Les mains de Bunny parcourent son torse musclé. Sa langue parcourt son cou. Bunny aime le goût de Lavi. Il remonte, mordille de lobe de son oreille. Bunny aime mordiller.

Puis Bunny se recule, juste un peu. Il regarde Lavi. Il sait ce qu'il veut. Il veut qu'il le veuille. Comme Bunny le voulait, tout à l'heure, au restaurant. Et il sait comment faire. Sa main redescend, lentement, glisse le long du torse, du bout des ongles, puis sur son pantalon. S'arrête quand elle rencontre celle de Lavi. Puis il la ramène, tout aussi lentement, jusqu'à son visage. Pose la grande main de Lavi a plat sur sa joue. Tourne la tête pour embrasser sa paume. Le tire par le poignet, pour faire glisser la main, amener les doigts jusqu'à ses lèvres.

Comme au restaurant. Il prend deux doigts dans sa bouche. Cette fois il sait qu'il n'a pas besoin de les retenir avec ses dents. Lavi ne retirera pas sa main. Il n'a pas le droit. Bunny fixe Lavi dans les yeux. Sa langue danse, glisse, s'agite, caresse. Ses lèvres aussi. Lent mouvement de va-et-vient. Toujours sans quitter les yeux de Lavi du regard. Sourire. Allumeur.

Il l'observe. Le fixe. Il est curieux. C'est la première fois qu'il essaie avec Bunny. La première fois que c'est véritablement un jeu. Il voit bien que les habitudes ont la vie dure. S'en rend compte quand il le tire par la main. Quand il lui dit d'approcher et ouvre des yeux incrédules quand il s'exécute. Quand il l'embrasse trop doucement. Puis il se ressaisit. Introduit sa langue dans sa bouche, y met les dents. Lui non. Il reste passif. Retient ses mains au dernier moment. Il n'est pas le Maître, ce soir. Il ferait bien de s'en souvenir s'il ne veut pas être puni. Il réprime un sourire. Peut-être a-t-il envie d'être puni, finalement.

Mais pas tout de suite. Ne pas aller trop vite en besogne. Il ne faudrait pas que Bunny se braque. Qu'il cesse le jeu. Celui-ci a trop bien commencé. Il ne reçoit que des ordres incomplets, ne peut rien faire. Voudrait arracher les lacets qui le compriment trop fortement. Se laisse asseoir sur le lit. Laisse ses mains retomber. Il n'a rien à faire. Alors ne fait rien.

Son souffle s'accélère un peu quand il sent la langue du Maître sur son cou. Ses oreilles, si douces, contre son visage. Il se force à rester immobile. A laisser sa main être guidée jusqu'à sa bouche. Il ne sait pas s'il a le droit de faire du bruit. Le méchant lapin connaît tous ses points faibles. Il laisse échapper un grondement rauque. Il n'est pas menaçant, non. Simplement excité.

Ses yeux restent fixés dans ceux de Bunny. C'est étonnant comme un simple jeu peut le changer. C'est intéressant. Amusant. Entertaining, comme il pourrait le dire. Il sait ce qu'il a envie de lui faire. Remarque qu'il aurait dû lui enlever le collier. Mais se contente de regarder. Il attend les ordres...

Bunny sent le souffle de Lavi s'intensifier. Lavi se laisse faire, docile. Ne bronche pas. Bien sûr, Lavi reste Lavi. Il finit quand même par laisser échapper un grognement que Bunny reconnaît. Lavi le veut. Non. Lavi commence seulement à le vouloir. Une idée commence à germer dans l'esprit de Bunny. Ce n'est peut-être pas ce que Lavi espérait, en le faisant devenir le Maître pour une nuit. Il n'en sait rien. Il n'est que Bunny, alors il fait avec ce qu'il est. Il libère la main de Lavi, se relève, s'écarte. Bunny commence à prendre un peu plus d'assurance. Ou du moins à réussir à faire semblant. Il rentre dans le rôle.

-Lève-toi.

Lavi obtembère, bien sûr. Bunny est le maître. Il a fini d'avoir l'air surpris que ses ordres fonctionnent. Se contente de profiter.

-Déshabille-toi. Lentement.

Les ordres de Bunny n'ont pas un ton autoritaire. Pas comme ceux de Lavi, parfois. Mais après tout, le Maître n'a pas besoin de parler de façon autoritaire pour se faire obéir, n'est-ce pas ? De toute façon il ne peut pas faire mieux. Bunny n'est toujours que Bunny.

Bunny profite du spectacle. Puis Bunny se rapproche. Glisse un Pas bouger à l'oreille de Lavi. Réfléchis un instant et rajoute Mais tu as le droit de faire du bruit, si tu veux. Bunny veut que Lavi le veuille vraiment. Il commence à l'embrasser, lui lécher le cou. Laisse volontairement son oreille effleurer sa joue. Bunny sait ce qu'il peut faire avec la sa langue. Puis il abandonne le cou, commence à descendre, lentement, un baiser à la fois, le long du torse de Lavi.

À les voir comme ça, on ne penserait pas que Bunny est le Maître. Il en a conscience. Et il sait que Lavi le pense aussi. Pour le moment. Bunny finit par s'agenouiller. Se concentre sur le nombril de Lavi, pour le moment. Plus bas, ce sera plus tard. Peut-être. Si Lavi est sage. Cette pensée fait sourire Bunny tandis que sa langue fouille le nombril de Lavi. Les mains de Bunny, qui ont glissé en même temps que son visage du dos de Lavi à ses fesses, reprennent leur chemin, continuent à descendre. Lentement, le long de ses jambes, jusqu'à ce que le bout de ses ongles vienne effleurer l'arrière des genoux de Lavi.

Quand il estime que Lavi le veut assez à son goût, Bunny se relève. À nouveau, il fait asseoir Lavi sur le lit, du bout du doigt, mais cette fois-ci, Bunny reste debout. Il vient lui murmurer à l'oreille.

-Maintenant Lavi, tu vas être très gentil avec moi. Tu vas me faire très, très plaisir. Et pour ça, tu auras le droit de me faire tout ce que tu veux. Tout...

Bunny recule un peu, regarde Lavi dans les yeux. Sourit. Ses oreilles s'agitent, volontairement. Gauche, droite. Comme pour attirer l'attention de Lavi. Puis un signe de dénégation, très lent, de la tête.

-Tout, Lavi. Sauf les oreilles.

Il sent le changement d'attitude. Bunny se prend au jeu. C'est l'objectif, bien sûr. Qu'il croit qu'il peut être le Maître. Qu'il croit que "Lavi" peut lui appartenir, vraiment. Lui obéir. Ne voir que lui, tout le temps. Mais sait-il seulement qu'être le Maître, c'est aussi subvenir à ses besoins, le protéger, intervenir auprès des mauvais payeurs, soudoyer et menacer les bonnes personnes. Être le Seigneur de son fief. Protéger ses métayers. Ses serviteurs. Ses serfs. Ses esclaves. Il avait été un esclave. Il avait été un soldat. Il avait été un moins que rien dans un ruisseau, un serviteur parmi d'autre. Puis il avait été un Seigneur. Et y avait pris goût.

L'ordre de Bunny le fait sortir de ses réflexions. Il se lève, obéissant. Retient un nouveau sourire en entendant l'ordre. Heureusement qu'il a un bon sens de l'équilibre. Ce n'est pas évident de retirer des cuissardes en restant debout. Il ne s'appesantit pas sur elles, pourtant, les rejette au loin rapidement. Puis il remonte lentement les mains le long du pantalon de cuir, effleure les lacets, les défait, minutieusement, avec des gestes langoureux. Le fait glisser, l'enjambe. Il se sent moins à l'étroit désormais. Plus à l'aise. Prêt à continuer encore longtemps.

Le lapin le tente. Lui dit de ne pas bouger. Lui dit qu'il peut faire du bruit "s'il-le-veut". Il réprime un grognement agacé, et un geste de désespoir ressemblant vaguement à sa paume, claquée sur son front. Évidemment, il ne bouge pas. Mais l'envie y est. Il n'est pas encore temps de déclencher une punition, cependant. Laisser le Maître s'investir plus encore.

Il fixe donc le mur, devant lui. Il n'est pas calme, bien entendu. Ses muscles sont tendus, ses nerfs à vif, quand les oreilles l'effleurent, quand la langue de Bunny s'insinue dans son nombril, quand il griffe l'arrière de ses genoux. Tous ses points sensibles... Il n'est pas calme mais en a l'apparence. Il a eu des années pour la perfectionner. A tout le moins pour n'importe quelle personne sourde. Car son souffle est court, et son grognement rauque semble ininterrompu. Il reprend une respiration tremblante quand il le pousse sur le lit.

Le Lapin n'a pas l'air si impliqué. Bien, il apprend vite. Puis il le regarde. Il a eu une idée. La lui expose. Louis est perplexe. Il a le droit de tout lui faire? Il entend la fin de l'ordre. Réprime un éclat de rire. Oui, il apprend vite. Magnifique. Tellement divertissant. Bien, puisqu'il en a le droit, il fera ce qu'il veut.

Difficile de le déshabiller sans effleurer ses oreilles. Il déchire donc proprement le t-shirt. Le retire. Lui embrasse le menton, tendrement. Après tout, il n'est que l'esclave, cette nuit, il ne peut pas se montrer trop violent ou entreprenant. Il laisse ses mains caresser son torse, effleurer du tranchant de l'ongle ses tétons dressés, puis descendre encore jusqu'à le dénuder entièrement.

Il papillonne, lâche une pluie de baisers légers alors qu'il se dirige, inexorablement, vers la verge dressée qui semble l'appeler. Il y a plus d'un endroit doux sur son lapin. Mais il ne le prend pas dans la bouche, non. Il l'effleure simplement de la langue. Une fois, deux. Puis il l'attire sur ses genoux, le soutient pour explorer son dos, ses fesses. Il prend ses bourses souples dans ses paumes, les fait rouler, les relâche. Sa bouche cherche celle de Bunny. Il le caresse, le pénètre d'un doigt humide.

Sourit enfin. Lui aussi est proche de la rupture. Il approche à nouveau sa bouche du visage du Maître, puis dévie au dernier moment, happant le bout de son oreille entre ses lèvres sur un halètement rauque. Comme s'il ne l'avait pas fait exprès. Oups. Il va falloir le punir maintenant...

Lavi reste stoïque. Normal, c'est Lavi. Mais Bunny le connait si bien. Il entend son souffle court, ce bruit rauque qui s'échappe de sa gorge. Il les reconnaît. Bunny est satisfait de son effet, alors il peut passer à la suite.

Lavi déchire son t-shirt. Tant pis, il en a d'autres. Lavi est tendre, doux. Si différent de d'habitude. Bunny aime bien. Mais Bunny aime moins que quand Lavi est brusque, impétueux. Dominateur. C'est agréable parce que c'est rare, que ça change, et que Bunny sait que c'est exceptionnel.

Bunny se laisse aller. C'est tellement rare. Cette fois, il n'a pas à attendre les ordres, il peut se permettre de simplement savouer. Il aime quand Lavi s'occupe de lui. C'est bon. Si bon... Désir. Plaisir. Qu'il ne cherche pas à cacher. Il a le droit, pour une fois. Il laisse échapper un petit gémissement quand le doigt de Lavi le pénètre. Se cambre légèrement. Plaisir. Il aime sentir Lavi en lui.

Et puis... Quelque chose. Qu'il prend quelques secondes à identifier. Son oreille. Il avait dit pas les oreilles. Bunny regarde Lavi. Lit dans ses yeux. Il l'a fait exprès ! Bunny trouve que ça a un côté rassurant. Ça prouve qu'au fond, c'est toujours Lavi qui tient les commandes. Ce n'est qu'un jeu, un de plus. Bunny sourit. Lavi veut être puni.

Bunny se relève, se détache de Lavi. Presque à contre-cœur , mais il n'en montre rien. Mouvement de tête, lent, de gauche à droite. Claquement de langue désapprobateur.

- Tu n'as pas été sage, Lavi.

Un mouvement du menton en direction du lit. Le même que Lavi a fait bien des fois, pour ordonner à Bunny de s'y installer. Avec presque la même autorité. Une fois qu'il a pris place, sur le dos, Bunny lui attache les poignets à la tête de lit. Sourit. Il sait déjà comment il va le punir.

Bunny grimpe sur Lavi, à califourchon. Tente de refréner son désir de lui. Il doit se concentrer sur son rôle, sur son idée. Le bassin de Bunny se met à onduler, lentement. Sa chair douce frotte contre le sexe de Lavi, le caresse, l'excite. Sans cesser son mouvement, il se penche en avant. Souffle dans son cou. Effleure les mains entravées avec ses oreilles.

Il ne doit pas aller trop vite, pas aller trop loin. Difficile de lutter contre son désir, quand il n'a pas d'ordre pour le retenir. Il lèche, mordille, lape le cou de Lavi. Se décale un peu pour laisser ses mains descendre le long du corps de Lavi. Ses mains si douce, si délicates. Si habiles. Qui connaissent si bien Lavi. Qui savent si bien lui plaire.

Ses mains s'affairent, caressent, effleurent, étreignent, frôlent, frottent. Bunny ne peut cacher qu'il aime ce qu'il est en train de faire. Presque autant que ce que Lavi lui faisait, un peu plus tôt. Bunny gémit, Bunny halètent, Bunny murmure le nom de Lavi. Mais Bunny est toujours concentré, pourtant. Bunny guette. Attend le moment. Celui qui précède le moment. Quand il le sent arriver, Bunny souffle à l'oreille de Lavi d'une voix entrecoupée par le désir.

-Tu as envie de moi ? Tu me veux, Lavi ?

Et puis tout contact cesse. Brusquement, Bunny s'écarte, se relève. Sans finir ce qu'il a commencé. Debout à côté du lit, hors de portée, il observe Lavi. Se caresse les oreilles d'un air machinal. Lentement... Langoureusement. Tire un peu dessus, comme Lavi le fait parfois.

-Tu m'imagines à quatre pattes, Lavi. Attendant, suppliant que tu viennes en moi, pendant que tes mains se perdent sur mes oreilles. Douces. Caressantes. C'est à ça que tu penses, pas vrai Lavi ? Imagine. Sens comme ce serait bon.

Puis, sans un regard en arrière, Bunny quitte la chambre.

A l'instant même ou Bunny se sépare de lui, Louis se rend compte qu'il sait qu'il l'a fait exprès. Il a manqué de self-control, comme ils disent. S'est laissé emporté. A repris le rôle du Maître. Le jeu perdrait presque de son intérêt. Il aurait dû avoir l'air plus contrit. Mais il n'avait pas fait ça depuis... Très longtemps. Et malgré tout ce qu'il peut dire où montrer, même lui ne peut rester indifférent devant les prouesses du lapin. Il n'est pas de bois. Pas de chair et de sang non plus. Pas tout à fait.

Il se laisse faire quand il lui ordonne de s'allonger sur le lit. Qu'il lui attache les poignets. Il retient un grognement. Il est censé être mortifié d'avoir enfreint les ordres, mais il est mauvais à ce petit jeu-là. Il sent son corps se tendre sous les caresses, prodiguées de main de maître, sans mauvais jeu de mots. Son humour a toujours eu un certain sens de l'à-propos, selon lui. Mais il ne l'a jamais essayé sur personne d'encore en état d'en raconter les effets ravageurs.

Petit à petit, sans pouvoir tout à fait se contrôler, il sent ses pieds qui se cambrent, son dos qui s'arque. Un long grognement commence à naître au creux de son ventre. La délivrance est proche. Puis tout s'arrête. Ah, oui... Il a été méchant. Un spasme involontaire fait céder le barreau du lit auquel il était accroché dans un craquement sonore, mais il la tête du lit de ses mains avec un grondement sauvage. Il n'est pas censé bouger.

Il tourne les yeux vers Bunny, le voit caresser ses oreilles, langoureusement, comme lui-même aimait le faire. Dans son esprit, il répond à sa question. Il a envie de lui, bien sûr. Mais pas de le voir soumis et suppliant. Il a envie de le voir dominant et au-dessus de lui. Menant la danse. Parfaire le jeu. Mais il a cherché lui-même la punition. Il suit ses petites fesses blanches des yeux quand il quitte la pièce.

Un mouvement, semblable à une convulsion, secoue le lit. Puis s'élève, dans la pièce plongée dans les ténèbres, un éclat de rire irrépressible, semblant interminable. Et il rit. Rit encore devant son corps si près d'exploser et abandonné, faussement attaché à ce lit, retenu uniquement pas la volonté de son lapin domestique, qu'il a adoubé Roi pour une nuit. Mais il découvrira, le Maître d'un soir, que la punition n'est jamais univoque. Qu'il ne le fait que pour s'assurer de son obéissance, mais qu'elle n'est pas agréable pour lui non plus. Il y a des choses qu'il faut savoir faire, quand on dirige. Des sacrifices à accepter.

Et il recommence à rire, moins fort, comme pour lui-même. C'est une nuit divertissante. Il secoue la tête, entend les boucles tinter. Et se plonge dans le travail, les informations qu'il a recueillies ce soir, pour éviter de penser à son sexe gonflé et gorgé.

Bunny ferme la porte de la chambre puis reste planté là. Immobile. Ou presque. Bunny tremble. Un torrent d'émotions contradictoires le submerge. Triomphe. Frustration. Désir. Inquiétude. Malaise. Confusion.

Bunny a réussi à ne pas céder, à s'arrêter à temps, à aller au bout de son idée ! Bunny aurait tant voulu ne pas s'arrêter... Bunny aimerait être encore de l'autre côté de cette porte, contre le corps chaud et puissant de Lavi. Bunny a peur d'avoir eu tort, d'avoir mis Lavi en colère, de ne pas avoir fait ce qu'il fallait. Bunny a puni Lavi... Il n'aime pas cette idée. Bunny existe pour satisfaire Lavi, pas pour le frustrer. Il n'a réussi à mener son plan à bien que parce qu'il a pu se convaincre que c'était ce que Lavi attendait de lui. Lavi avait cherché la punition... Mais même comme ça, l'idée le gêne.

Bunny n'aime pas ce jeu. Il le perturbe, le met mal à l'aise. Déséquilibre. Bunny sait obéir, pas diriger. Il n'est pas fait pour ça. Il est faible, vulnérable. Une erreur. Un lapin. Ce n'est pas une découverte bien sûr. Il savait depuis le début qu'il n'aimerait pas ça. Bunny n'aime pas diriger, Bunny n'aime pas commander et surtout, surtout, Bunny n'aime pas punir. Mais c'est ce que Lavi veut. C'est son jeu. Bunny doit obéir. Suivre les règles. Toujours.

Il déambule dans l'appartement, se retrouve dans la cuisine, découvre l'assiette abandonnée un peu plus tôt. Se rappelle qu'il meurt de faim. Décide de terminer son assiette. Lentement. Il se jetterait bien dessus, mais se force à prendre son temps. S'il revient trop vite, la punition ne sera pas adéquate. Combien de temps doit-il attendre au juste ? Il ne sait pas trop.

Bunny a terminé son assiette. Mangé lui a fait du bien. Il se sent mieux. Bunny ne veut pas décevoir Lavi. Il doit se montrer à la hauteur. Ce n'est que du théâtre au fond. Bunny sait être bon acteur. Lavi lui a déjà fait jouer bien des rôles. Ce n'est qu'un de plus. Pas complètement, parce qu'il doit rester Bunny. Mais Bunny qui serait aussi fort que Lavi. Oui. Il peut jouer ça.

Il attend encore un peu, puis décide que la punition a assez duré. La porte de la chambre se rouvre dans un mouvement brusque et bruyant. Bunny saute sur le lit avec assurance. Du moins en donne l'illusion. À nouveau à califourchon sur Lavi. Ce simple contact réveille son désir, qui s'était un peu endormi durant qu'il a passé à l'extérieur.

Bunny saisit Lavi par les cheveux, comme Lavi l'aurait fait dans la situation inverse. Leurs visages sont presque assez proches pour se toucher. Leurs souffles se mêlent.

-Assez pour la punition. Maintenant il est temps de te faire pardonner. Je veux que tu me fasses crier, Lavi, comme jamais je n'ai crié. Et pour une fois, c'est toi qui vas me supplier.

Il n'en montre rien, mais Bunny se surprend lui-même. Au fond, il est heureux que ce jeu ne dure pas plus d'une journée. Bunny a toujours été celui qui supplie, celui qui plaît, celui qui reçoit. Il n'a aucune idée de ce qu'il va ressentir, en passant de l'autre côté. Mais pour ce soir, il est le Maître, et le Maître prend. C'est ce que Lavi veut, alors c'est ce que Lavi aura.

Les implications politiques. C'est toujours ce qui complique tout, dans le monde interlope. C'est ce qu'il déteste le plus. Même à l'époque où c'était nécessaire, où il risquait de finir sur le bûcher, il n'avait jamais réussi à y prendre goût. D'autant que son esprit ne cessait de revenir à la façon dont il avait réuni ces informations. Au crissement des disques qui tournent sur eux-même, des cheveux qui s'emmêlent dans ses doigts alors que la peau cède, que la chair se déchire, que les muscles cèdent, d'une grande gerbe de sang alors que la carotide et la jugulaire s'ouvrent simultanément, pendent comme d'inutiles tuyaux au bout de la tête qui peine à se rendre compte qu'elle n'est plus raccrochée à rien, le bruit mouillé, le craquement, quand les deux morceaux s'écrasent au sol, marionnettes grotesques.

La frénésie sanguine et le souvenir du corps de Bunny sur le sien ne font rien pour calmer son état, en définitive. Il se torture tout seul, persuadé de résister. Crétin imbu de lui-même. Mais c'est là qu'est le jeu. Obéir au Maître, qui lui a ordonné de ne penser qu'à lui, même si en des termes différents. Il sait ce qu'il doit faire pour ça. Il inspire profondément, puis retient son souffle, ferme les yeux. Se concentre sur son ouïe. Trouve enfin le lapin, écoute sa lente mastication. Il a décidé de finir son repas. Compenser une faim par une autre, il connaît. Il l'entend revenir. Réintègre ses autres sens, brusque retour qui ne fait rien pour arranger son excitation. Il serait sage, désormais... Peut-être.

La porte s'ouvre brusquement, claque. *Presque trop fort, elle aurait pu revenir et tu ne voudrais pas faire couler le sang ce soir, n'est-ce pas, Bunny?* Une fois encore, il se dit qu'il serait dommage de céder maintenant. Alors qu'il venait de lui prouver qu'il pouvait s'investir dans un rôle. Qu'il pouvait le divertir d'une nouvelle façon. Mais une nouvelle idée lui est venue. Un nouveau jeu, dans le jeu. Ou comment pousser son rôle de soumis jusqu'au bout. Il ne l'a pas fait depuis longtemps, il risque d'être étroit, peu préparé. Peu importe...

Il retient un sourire, qui se change en grognement quand le corps refroidi se colle au sien. Il n'aime pas avoir froid. Au moins, il se calme assez pour pouvoir tenir un peu plus longtemps. Pour pouvoir obéir. Il entrouvre la bouche quand il lui tire les cheveux. Il sait ce dont il a envie, tout de suite. Mais ce n'est pas son tour. Cela dit, il se demande comment son lapin espère qu'il pourra lui faire ce à quoi il pense avec les mains attachées. Il hausse un sourcil et, nonchalamment, se débarrasse des menottes. Maintenant, il va pouvoir poursuivre.

Ses doigts, sa bouche, semblent être partout à la fois. Sur ses oreilles, ses lèvres, son cou, ses tétons, son ventre, son dos, son sexe, ses fesses, ses jambes. A genou penché sur lui, il le pénètre de sa langue, encore. Le caresse du bout des doigts. Puis il sème l'intérieur de sa cuisse de baisers. *C'est le moment d'être prudent.* Il ouvre la bouche, remplace sa langue par ses dents, ses canines trop longues, habituées à percer la chair, et qui se serrent, délicatement, avec un soin extrême, pour n'envoyer que des lances de plaisir.

Quelques instants, il lutte contre l'afflux de sang qu'il sent si près, à portée de croc. Il lui suffirait de serrer un tout petit peu plus, pour se gorger du liquide vital capiteux, qu'il imagine déjà aussi doux que le reste de sa personne. Il tremble de désir contenu. Se retient au dernier instant avec un grondement bestial.

Il remonte, doucement. Laisse sa verge se frotter contre celle de Bunny, en appui sur les mains, pour ne pas l'écraser. Il a fait attention à ne pas tout à fait le satisfaire. Lui aussi sait jouer à ce jeu. Il enfonce son visage dans ses cheveux, sa bouche tout contre l'oreille duveteuse qui le tente. Entre deux halètements, il murmure, d'une voix suppliante:

"Bunny... Maître, je t'en supplie, laisse-moi jouir... Je t'en prie... Prends-moi!"

Il dissimule un sourire en happant l'oreille entre ses lèvres et, sans laisser à Bunny le temps de réagir, le guide en lui. C'est un peu plus douloureux que prévu, mais ça ne l'a jamais arrêté. Il ne stoppe pas, poursuit jusqu'à ce qu'il sent le bas-ventre du lapin sous ses fesses. Puis il se redresse, figé, couvert de transpiration. Le fixe, implorant. C'est à lui d'imprimer le rythme, désormais. Mais osera-t-il? Il réprime le sourire qui fait frissonner ses lèvres. Il joue désormais son rôle à la perfection, mais le lapin fera-t-il de même?

Lavi est partout sur lui, en lui. Sa bouche, ses main, ses lèvres, sa langue, ses dents, ses doigts, son sexe, son corps. Lavi tout entier dédié au plaisir de Bunny. C'est plus qu'il n'avait jamais osé rêvé. À nouveau, comme un peu plus tôt, Bunny se laisse. Complètement. De tout son être. Bunny savoure, déguste, de délecte. Bunny halète, transpire, se tend, se cambre. Tant de plaisir. Petit lapin n'a jamais connu ça.

Ça lui paraît si étrange, de ne pas avoir à veiller à suivre une consigne, de n'avoir pas d'ordre à suivre, de pouvoir, simplement, profiter du plaisir qui lui est donné. Étrange et tellement, tellement bon. Unique aussi, il en a conscience, mais c'est aussi une des choses qui font que c'est si bon. Un cadeau qu'il savoure avant de redevenir Bunny le soumis.

Des vagues de plaisir, partout dans son corps. Il se cambre, il gémit. Mais il peut encore en supporter bien davantage avant que ce ne soit terminer. Instinctivement, son bassin commence à onduler quand le membre de Lavi vient frotter contre le sien. Il cherche le contact, encore plus, toujours plus.

Il entend Lavi murmurer à son oreille. S'étonne de découvrir l'effet de ce souffle suppliant sur son excitation. Laisse échapper un gémissement rauque. C'est donc ça que ça fait, d'être désiré ? Comme il comprend, maintenant, que Lavi aime tellement ça. En bon petit lapin, c'est à ça qu'il pense, à cet instant. À comment il suppliera Lavi, quand ils auront repris leur place, pour lui faire ressentir encore ce que lui vient de ressentir.

Et soudainement, ça arrive. Bunny se fige un instant, fixe Lavi. Sensation déroutante, inconnue. Et pourtant agréable... Bunny est déstabilisé mais son corps, lui, sait ce qu'il a à faire. Le désir prend le dessus. Bunny s'active. Ondule. Va et vient. Le mouvement est lent, d'abord. Doux. Presque timide. Bunny découvre.

Les mains de Bunny parcourent le dos de Lavi. Ses ongles s'y accrochent, sans pour percer la peau. La bouche de Bunny dévore celle de Lavi. Ses oreilles. Son cou. Le mouvement s'accélère. Les oreilles de Bunny s'agitent. Ses oreilles si douces, mais si sensibles aussi.Soft spot. Bunny voudrait y sentir la main de Lavi. Bunny aime les mains de Lavi sur ses oreilles. Quand il les caresse, les touche, les palpe, les tire, même. Bunny se rappelle que ce soir, il a tous les droits. C'est lui le Maître. Alors il réclame.

-Lavi. Les oreilles, Lavi.

Souffle rauque, lâché dans un halètement. Le mouvement s'intensifie. Les mains de Bunny ont glissé jusqu'aux hanches de Lavi. S'y agrippent, les guident, leur impriment le mouvement qu'elles doivent suivre. Bunny ne gémit plus. Bunny crie. Sons inarticulés, parmi lesquelles se glisse parfois le nom de Lavi. Sa voix d'habitude douce et fluette, rendue éraillée par le plaisir.

Mais même à cet instant, Bunny reste Bunny. Et même sur la brèche, Bunny ne part pas seul. Lavi a supplié, a demandé de le laisser jouir. Bunny compte bien le lui accorder. Mais Bunny veut quand même attendre le dernier moment. Qu'ils doivent se retenir, tous les deux. Faire durer le plaisir. Encore. Juste un peu. Jusqu'à ce qu'il sente qu'il arrive à sa limite.

- Jouis.

Un seul mot. Le premier, peut-être, qu'il arrive vraiment à faire sonner comme un ordre. Parce que ça, il le veut. Réellement, de tout son être. Bunny reste Bunny.

Quand il en reçoit l'ordre, il caresse les oreilles de Bunny. Non qu'il n'en est pas eu envie. Mais il est l'esclave. Aujourd'hui, depuis toujours, à jamais. Il ne sait plus. Il sent son sexe au plus profond de lui. Retrouve de vieux réflexes. Se décale, dans l'étreinte, entre deux gémissements, pour que le Maître atteigne exactement l'endroit où il a envie de l'emmener. Sent ces mains, habituellement si douces, sur ses hanches. Sent les vagues de plaisir qui montent. Encore. Il sait qu'il obéit. Que jamais son amant n'a poussé de tels cris. Et pourtant, lui n'a pas encore le droit à la délivrance. N'en a pas reçu l'ordre. Ni l'autorisation. Un cri presque douloureux lui échappe, et la longue litanie de ses supplications reprend.

Une partie de lui se demande si Bunny n'a pas oublié ce qu'il lui a dit. Qu'il ne ferait rien qu'il ne lui aurait pas ordonné. Or, il n'a rien mentionné à ce propos. Cette part de lui, ironique, cruelle, le raille en lui rappelant qu'il faut garder la tête froide quand le plaisir de quelqu'un dépend du moindre de ses mots.

Ses hanches ondulent, il se presse contre lui, lutte contre l'extase qui menace. Pas encore. Pas encore. Pas encore. Résiste. Et sinon... Il se souvient encore de la façon dont les deux uniques cicatrices qui parcourent son corps, son dos, de haut en bas et de droite à gauche, ont été infligées. Il n'avait pas été sage... Il ne recommencera plus. C'est promis... Mais, par pitié, qu'il le laisse jouir, enfin... Et puis, enfin, l'ordre arrive. Dans un spasme, accompagné d'un grondement qui avait pris naissance au creux de son ventre, avant de se frayer un difficile chemin à travers sa gorge, il s'exécute, son sperme jaillit, s'étale sur son ventre, celui de Bunny, quelques instants à peine avant qu'il ne le sente se contracter en lui.

Il halète encore, le souffle court, appuyé sur ses avant-bras au-dessus du lapin. Il ferme les yeux. Il s'est vraiment laissé emporter, cette fois. Le jeu a été bien trop proche de la réalité. Il a perdu. Il a arrêté de jouer. Il a été. C'est un échec cruel. Qui lui rappelle qu'il n'est pas tout-puissant. Il se détache de lui, se cambre pour faire sortir le jeune homme, puis s'allonge à son côté. Il pose la tête sur son épaule. Il va avoir mal partout, le lendemain. Il inspire. L'aube approche. Il a envie de prendre une douche, de chasser les derniers vestiges de souvenir. Il n'a pas besoin de les voir pour sentir les cicatrices.

Il a envie de sourire, mais n'y parvient pas. Bunny n'a jamais vraiment compris qu'il était le Maître. Que la parole du Maître était absolue. Il aurait pu déclarer le jeu nul et non avenu. Puisqu'il était le Maître. Le laisser reprendre le contrôle. C'était une bonne chose. Il n'avait pas envie de devoir le briser. Mais il l'aurait fait sans remord. Presque. Bunny a perdu, mais c'est sa nuit. Alors il souffle, comme un aveu:

"J'ai perdu."

Il se demande ce que son animal domestiqué va décider de faire. Mais en attendant, il lui effleure distraitement les oreilles. Se rattrape. Veut voir s'il saura encore être dans son rôle, maintenant. Probablement pas... C'est à voir.

La jouissance de Lavi entraîne celle de Bunny. Parce que même au cœur de ce jeu étrange où il est le Maître, il n'y a rien au monde qui plaise plus à Bunny que de plaire à Lavi. Bunny regrette que Lavi s'écarte de lui, de ne plus être en lui, mais il le laisse faire. Moitié par habitude, moitié parce qu'il est de toute façon trop fatigué pour réagir.

Bunny se sent bien. Épuisé, mais heureux. Il n'arrive pas encore à vraiment réaliser ce qu'il vient de faire. Il est toujours étonné, émerveillé de tout ce qu'il a pu ressentir. Finalement, il est heureux que Lavi ait décidé de ce jeu. Heureux de cette découverte qu'il a faite, de cette découverte inattendue. Tout comme il sera heureux de retrouver son rôle. Peu importe à quel point il a apprécié tout ça, il a hâte que tout reprenne sa place. Malgré tout, il n'oublie pas, n'oublie jamais, qu'il n'est que Bunny.

Quand Lavi pose sa tête sur son épaule, Bunny l'entoure de son bras. Ça aussi, ça lui fait bizarre. C'est Bunny, normalement, la petite chose qui se recroqueville sous la protection des bras puissants de Lavi. Mais peu importe. Bunny aime sentir Lavi contre lui, c'est tout ce qui compte. Quand Lavi lui souffle qu'il a perdu, Bunny reste sans réaction pendant un moment. Hésitant. Est-ce que ça veut dire que le jeu est fini ? Non. Il se souvient des règles. Jusqu'au coucher du soleil. De sa main libre, Bunny vient caresser la joue de Lavi. Et, subitement, le gifle.

- C'est le Maître qui décide si tu as perdu. Lavi a gagné le jeu.

La main de Bunny redevient caressante sur la joue de Lavi. Récompense, consolation ou excuse ? Difficile à dire. Même Bunny n'est plus sûr de le savoir. Bunny est fatigué. Bunny veut que les choses redeviennent normales. Bientôt. Le soleil va bientôt se lever. Alors, Lavi dormira. Jusqu'à ce que la nuit retombe. Et que tout retrouve sa place.

- Va te laver. Ensuite on dort. C'est bientôt le jour.

Bunny aurait pu aller prendre sa douche avec lui, mais il ne s'en sent pas la force. Et ils n'ont pas le temps, avant l'aube. Bunny ne sait pas pourquoi Lavi se couche toujours en même temps que le soleil se lève. Ne s'est jamais posé la question. Aujourd'hui encore, il ne se la pose pas. Lui se lavera en se levant. Pour le moment, Bunny se roule en boule dans son coin du lit, comme il le fait souvent pour dormir. Quand il en a le droit.

Quand Lavi reviendra, Bunny se sera peut-être déjà endormi. Mais même si c'est le cas, le lapin roulera sur le côté pour venir se blottir contre lui. C'est comme ça que Bunny dort le mieux.

Il ne s'est pas attendu à la gifle. Les souvenirs l'ont vraiment tourneboulé. Il est difficile parfois de s'extirper de ce temps passé, de ce maelström de gens croisés, vivants ou morts. Jouer lui permettait de sortir de ce marasme, habituellement. Mais il a besoin d'y réfléchir. Et ça, ça n'avait pas été programmé. Il n'aurait jamais cru que Bunny le ferait. Une bonne surprise, mais qui a failli lui coûter cher. Plus vif que l'eau d'un torrent, il s'est retourné, a posé ses crocs contre la gorge palpitante, ses mains contre le ventre tendre. Ce n'était vraiment pas passé loin. Pour se redonner une contenance, il souffle un ironique "Oui, Maître", et ramasse sa semence sur son abdomen, avant de se lécher les doigts.

Il se lève, le regarde se rouler en boule, et part pour la salle de bain, à temps pour ne pas tacher le plancher avec le fluide qui lui coule le long des cuisses. C'était une bonne nuit, vraiment, mais il n'était pas prêt de recommencer de sitôt. D'autant que le Boss lui demanderait des comptes, le lendemain... Il soupire. Mardi Gras, hein? Ce n'est qu'une nuit dans l'année, après tout...