Ce genre de nuit, pour Yellow, ça n’arrivait pas tous les quatre matins*. Une nuit douloureuse à l’extrême, une nuit où l’animal qui l’habitait devenait complètement fou, rempli d’une haine farouche, destructrice – et bouffait tous les inconscients venus faire un bain de minuit. Oui, c’était une nuit de pleine lune classique pour tout lycanthrope qui se respecte, mais comme notre ami se le disait par fois : lui ne faisait rien comme tout le monde. Quant à savoir maintenant s’il s’agissait d’un avantage ou d’un inconvénient…
Bon, dans ce cas précis, on pouvait tout de même clairement affirmer que c’était de loin une sérieuse gêne plutôt qu’un atout. Vivre des pleines lunes complètement aléatoires impliquait que le requin n’était jamais sûr de ce qui allait lui arriver ou pas. Avoir des courbatures quand le soir approchait, par exemple, ne signifiait en rien que sa transformation aurait lieu. Pour prévenir, il se rendait donc à chaque fois – et le plus souvent inutilement – sur la baie de Naniwa. Et pour les rares fois où sa métamorphose se manifestait, il avait en général eu le temps d’oublier la souffrance que cela lui infligeait. C’était un peu comme revivre constamment la première lune en somme. Un véritable plaisir…

Bref, tout ce magnifique et long pavé pour dire que le poiscaille avait bien douiller la veille et ne se rappelait strictement rien de ce qui s’était passé à partir du moment où ses jambes se rapprochaient visuellement plus d’un amas de chair bleue en reconstitution plutôt que de tout autre chose.

Le soleil avait percé le ciel depuis quelques petites heures maintenant et, sur la plage, ce n’était non plus un requin que l’on pouvait observer mais simplement l’homme-poisson, nu, étendu face contre sable et visiblement pas très décidé à bouger malgré les deux yeux bleus qu’il avait grand ouverts. Tant pis si des flics venaient l’arrêter pour atteinte à la pudeur, ça ne serait pas vraiment une première... Et puis qui pouvait bien se balader à cette heure sur la baie de toute façon, hm ?

…Oh.

« Nan, vous faites pas de bile mademoiselle : je suis vivant. Le bleu c’est ma couleur naturelle. »

Et sur ces mots, il entreprit de commencer à se redresser. Devant une dame, ce n’était sans doute pas la meilleure idée que Yellow n’ait jamais eu. Mais eh, c’est de Yellow dont on parle après tout… Que peut-on réellement attendre de quelqu’un qui possède le QI d’une huître farcie ?



* Mesdames, messieurs, admirez avec quelle phrase improbable commence ce rp et préparez-vous psychologiquement pour la suite.