Ah, la joie de se lever avec un mal de tête. Putain de vie, hein. Pourtant, elle n’avait pas réellement trainé pour aller se coucher, ce matin-là. A peine rentrée de chez Billy, des courbatures partout et totalement crevée, elle n’avait même pas prit la peine de se dévêtir ni de passer chez Luke pour du café. Non, tout ce dont elle avait été capable fut de s’écrouler sur son lit et s’endormir sur le champ.
Pour ensuite se réveiller bien plus tard qu’elle ne l’aurait dû. Avec un mal de tête en prime.
Résultat, elle s’était retrouvée à devoir se préparer à la va vite, avalant un café toujours aussi dégueulasse, le tout a mettant d’une humeur absolument détestable. Ah, ça allait être une journée superbe, pour sûr. Surtout en sachant qu’il n’était que midi.

D’un naturel plutôt grognon et facilement agacé, Úna était ce genre de personnes qui devenait pire encore lorsqu’elle n’avait pas assez dormi. Ou qu’une migraine affreuse lui vrillait les tympans, au choix. Et ne parlons même pas de l’alliance des deux. Autant dire que si elle l’avait pu, elle ne serait pas venue travailler aujourd’hui. Malheureusement, la vie n’était pas si facile, ah non. Sans ce job-ci, ainsi que le second, elle ne pouvait pas s’assurer une vie descente, et pour être tout à fait honnête, elle s’y était faite. Oh, ça n’était pas franchement de tout repos, et les regrets concernant ses études étaient toujours présents, mais c’était mieux que rien. Somme toute, elle ne se trouvait pas particulièrement à plaindre.

Occupée à ranger des marchandises sur leurs tablettes respectives, l’air totalement ailleurs –et la dégaine d’un zombie- il lui fallut un peu de temps pour réaliser que quelqu’un venait d’entrer. Ça n’était qu’une petite supérette sans grande prétention, de quoi dépanner au coin d’une rue. De ce fait, elle se retrouvait la plupart du temps toute seule, surtout à cette heure-ci. Eh bien oui, c’était l’heure à laquelle son idiot de collègue prenait sa pause.

Alors non, elle n’avait absolument pas réalisé que quelqu’un était entré, et se rapprochait. Jusqu’à ce qu’une odeur relativement familière ne vienne chatouiller son odorat, du moins. Être lycan avait quelques avantages –qui se transformaient cependant parfois en fardeaux plus qu’autre chose. Autant dire que même crevée, elle n’eut pas trop de mal à reconnaître la personne qui se tenait dans l’allée à présent.

« Mais qui voilà. Mon p’tit loup préféré. » Le tout avec un sourire railleur au coin des lèvres. Parce que oui. Même avec une gueule de zombie, elle était encore capable d’être chiante. Surtout avec lui. « J’te manquais tant que ça pour que tu viennes jusqu’ici me voir, hm ? » A croire que rien ne pouvait vaincre sa nature profonde. Ni son naturel taquin, pour le coup.

but no man could truly tame a wolf

Ah, lui c’était certain qu’elle ne pouvait pas le manquer. Il fallait dire que depuis le temps qu’elle squattait son diner, tous les matins ou presque après son job, elle avait fini par se faire à sa présence. Au point d’être capable de reconnaître son odeur sans le moindre mal, et ce au-delà de simplement repérer qu’un autre loup était dans les parages. Le genre de trucs un peu embarrassant à admettre, il fallait bien le dire. Et autant être honnête, elle se gardait bien de le lui avouer. Il était déjà assez chiant comme ça, et Úna ne comptait pas lui donner la moindre raison de l’embêter un peu plus.

La plupart du temps, leurs interactions étaient faites de piques taquines et moqueuses, lancées avec un sourire railleur. C’était comme ça depuis le début, à vrai dire. Il lui semblait du moins. Chose certaine en tout cas, c’était venu presque naturellement. Peut-être son air toujours grognon qui la poussait à vouloir l’embêter. Puis bon, au fond elle l’aimait bien, Luke et son air de loup mal léché.

Aujourd’hui cependant, la brunette n’était pas vraiment d’humeur à jouer. Pas suffisamment pour prendre à la rigolade ses remarques, trop prompte à s’emporter et se vexer pour un rien. A l’accoutumée déjà, il était facile de l’énerver, pour peu que l’on sache s’y prendre. Alors autant dire qu’avec une migraine carabinée et un manque de sommeil flagrant, ça ne risquait pas d’être bien compliqué.
Sa première réponse déjà lui fit froncer légèrement les sourcils, affichant une moue contrite. Eh, c’était plutôt méchant à dire, ça. Et elle ne comptait pas rester silencieuse face à ça, oh non. « Désolée de te l’apprendre, je suis plutôt tenace comme bestiole. » Ah non, la rigolade ne serait peut-être pas totalement de mise en cette journée. Et ce même si elle avait commencé sur quelques blagues légères. Elle était comme ça Úna, une seconde elle riait et l’autre elle vous arrachait les tripes à coup de griffes. En pensées du moins.

Le voyant sourire de la sorte, elle roula des yeux, lâchant un soupire, avant de reporter son regard sur le rayon devant elle. Crétin va. Elle détestait quand il souriait de la sorte. Pour la simple et bonne raison qu’elle y était un peu trop sensible, à ce putain de sourire à la con. Eh, autant le dire, il était mignon, le loup. Alors ouais, qu’il lui sourit de la sorte pourrait presque la pousser à se radoucir. Mais non. Surement pas. Elle ne comptait pas lui laisser ce genre de victoire, eh.
Au lieu de cela, elle haussa les épaules, laissant échapper un ricanement moqueur, pour ensuite lui glisser un regard en biais. « Un mec sexy ? Je vois juste un p’tit loup qui se pense viril, moi. » Et elle ne voyait pas de quoi il parlait en la traitant d’affamée; à moins qu’il ait connaissance d’une certaine chose, mais. C’était impossible. « Par contre, on a du shampoing antipuces. Tu devrais essayer. » Ah non, elle ne comptait surement pas s’arrêter après sa première réplique. Cela aurait été trop gentil de sa part, tiens.

Et pour le coup, il aurait mieux fait de se taire. Voilà que la demoiselle le fixait, les sourcils froncés, affichant une moue clairement vexée. Avant de hausser les épaules, se concentrant une fois de plus sur son allée, visiblement absolument passionnante. « Bah si elle était si jolie t’aurais dû lui demander son numéro dans ce cas, histoire d’arrêter de me faire chier et te vider les couilles. » C’était dit avec tant d’élégance et de gentillesse -ainsi qu'une pointe de jalousie peut-être. Il eut même le droit à un sourire, d’ailleurs, du genre crispé, bien plus qu’elle ne voudrait. Puis, elle n’avait même pas relevé qu'il avait préparé son café d'avance. En temps normal, ça l'aurait surement faite réagir, mais là.
Et elle aurait pu dire pire, si elle n‘avait pas été interrompue par son imbécile de collègue qui revenait. Le tout en lui glissant quelque chose du genre « c’est pas le moment de draguer t’es sensée bosser. » Tout ce qu’il fallait pour la faire rager un bon coup.

« Bordel mais allez tous vous faire foutre, sérieux. » Une sortie pleine de dramatisme pour la demoiselle, visiblement trop vite agacée. Et qui ne trouva rien de mieux que de s’éloigner une rangée plus loin, grommelant à voix basse.

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