Tu ne te souviens pas vraiment de comment tu as pu en arriver-là.
Toi, adepte de ces coups d'un soir sans avenir. Toi, qui ne laisse jamais aucune trace quand au petit matin, tu t'évades. Comment son bras a-t-il pu se retrouver autour du tien à te garder jalousement ? Tu sens son parfum pompeux se mêler au tien dans un arrangement écoeurant. Tu suffoques, cherches une échappatoire à ton malheur. Tu jettes un rapide coup d'oeil à sa tignasse brune, à son maquillage outrancier. Ce n'est même pas ton style. Tu devais vraiment avoir quelques grammes en trop, ce soir-là. Tu fronces les sourcils, tritures tes deux méninges qui s'entrechoquent. C'était quand ? Depuis que tu avais revu Max, il y a une semaine tu n'étais pas ressorti.

« Haaaaarl', qu'est-ce qu'on fait ? » Une voix stridente qui se veut mielleuse. Raté. Elle te lance un regard équivoque, se frottant un peu plus à toi.« Et si on allait chez moi? »

Oh pitié non. C'est bien ce que tu penses, hein. Tu te crispes légèrement, tentant en vain de t'écarter un peu. Elle est tenace, cette teigne. T'es pris au piège, ça doit être une punition divine pour tous ces corps que tu as bafoué avec ton amour factice. Tu es seul face à l'ennemi, pas de Joe pour te sortir de là. Pas de bouée de sauvetage. T'es vraiment foutu. Tu accélères le pas avant de te décider à répondre avec cet air enjoué.

« Non, j'peux pas. J'ai trop la dalle, j'ai besoin de croquer un bout avant. » Tu vrilles tes pupilles bleutés vers elle. « Sans carburant, la machine marche pas. » Un clin d'oeil et tu ricanes légèrement devant son air renfrogné. Toi, tu te félicites mentalement d'avoir réussi à éloigner ta sentence d'une heure tout au mieux. Une heure pour trouver une solution. Ça doit être faisable, juste un peu d'imagination.

« Là. » La sangsue toujours au bras, tu pousses la porte d'un petit café auquel tu n'avais jamais prêté attention autrefois. Faut dire que les fast-foods en tous genre te conviennent mieux que les petits cafés cosy comme celui-ci. Tu analyses rapidement les lieux, il y a une dizaine de personnes. La plupart en groupe de 2 ou 3, mis à part un vieil homme en costard qui lit son journal et ce gars. Un petit brun gringalet, un peu à l'écart qui te tourne le dos. Tu souris. Visiblement soulagé, tu l'as trouvé ta solution. Tu te tournes vers ta conquête d'une nuit.

« Écoute, Jen. En fait, j'voulais absolument te présenter quelqu'un , suis-moi. » Tu te défais de l'étreinte de son bras, la prenant par la main avant de te diriger avec assurance vers le brun devant toi. Tu te rapproches, tu sais déjà ce que tu vas faire. T'espères juste ne pas te recevoir une droite. Tu t'arrêtes juste derrière lui, souris à ta compagne avant de faire passer tes bras le long des épaules du jeune homme pour l'enlacer, collant son dos à ton torse musclé.

« Mon coeur ! » Avec un peu trop de naturel et de joie, tu t'exclames. Le visage fourré dans le cou de ta pauvre victime. Deux en une journée, harl'. Tu finiras vraiment par le payer. Tu te retournes vers elle.« Jen', voilà je te présente mon copain. »

Spoiler:

Il recrache un peu de sa boisson sous ton emprise et toi tu souris à une Jen interloquée qui ne semble pas y croire. Tu déconnes Harley, comme si un parfait inconnu allait te suivre dans tes délires douteux. Vas-y écoute-le balbutier quelques mots qui sonnent comme une sentence à tes yeux. Il t'abandonne à ton pauvre sort. Faut dire qu'en te voyant, il est difficile de deviner que tu es actuellement en plein désarroi.

«  Je...Je pense qu'il doit y avoir une erreur... Vous devez me confondre avec quelqu'un... »


Il te tente de te repousser, tu sens son coude émettre une pression sur tes côtes. Tu te redresses l'air de rien reportant ton regard sur ce visage rougeoyant qui t'extorque un sourire de vainqueur. Vainqueur de quoi ? Pas grand-chose, ça te procure juste ce petit plaisir, cette satisfaction personnelle d'observer de telles réactions à ton égard. Même s'il semble logique de penser qu'il ne fait que réagir à la situation. Tu le clames haut et fort gay tout comme toi, il y a de quoi être mal à l'aise, non ? Jen n'a toujours pas dit un mot, elle se contente de te couver d'un regard courroucé avant d'exploser, cela arrivera bientôt ... Tu le sais. Alors, tu te redresses, abandonnes le cou de ta victime. Avant de t'asseoir sur le siège à ses côtés, de profil histoire de faire face aux deux. Rebondir est la seule solution. Allez, fais travailler tes deux pauvres neurones tu devrais trouver. Tu plonges ton regard dans les yeux océans de ton vis-à-vis tentant tant bien que mal d'y faire transparaître tout ton désarroi. Du bout des lèvres, tu mimes un help à celui-ci espérant qu'il réponde à ton mayday de manière affirmative. Tu reprends un peu d'aplomb posant doucement ta main sur sa cuisse, si le poing n'était pas encore parti peut-être viendrai-t-il après cela.

«Oh je t'en prie, fais pas le timide, mon amour. » Tu minaudes tant que tu peux alternant entre les œillades suppliantes au jeune homme et celles à moitié amouraché à la brunette. Brunette qui d'ailleurs commence à s'impatienter. D'un geste brusque elle s'approche, bouscule légèrement le garçon pour venir se saisir de ta main, la délogeant de sa jambe. Tu fronces les sourcils alors que sa voix stridente s'élève.

« Harl' tu t'fous de ma gueule ? C'est quoi ce délire, arrête de nous taper l'affiche ! T'vas me faire croire qu'après l'autre soir, t'es gay ?! » Elle soupire, agacée. Vexée d'un tel affront. Elle lance un coup d'oeil mauvais à l'inconnu avant de reprendre de cette même langue véhémente. « Arrête de rougir toi ! On pourrait croire que c'est vrai. »

Elle fulmine. Et toi, tu t'agaces. Une véritable harpie.T'as beau les aimer sauvages, il y a des limites Harl'. Faut que t'apprennes à différencier le côté animal du côté emmerdeuse. Ce sont deux choses viscéralement différentes. Tu soupires te levant pour lui faire face. Tu tournes ta tête vers le brun arquant les sourcils d'un air de dire : « t'as vu une vraie folle. »

« Calme-toi et laisses-le rougir ... Ca m'fout dans tous mes états. » Tu affiches un large sourire qu'une baffe ne tardera pas à effacer dans quelques instants. « Et oui, t'as tout compris. Je doutais un peu alors j'ai voulu vérifier ... Maintenant c'est sûr. J'aime son service troi- » Pièces. C'est le dernier mot qui aurait ponctué ta phrase si elle ne t'avait pas frappé. Le visage tourné, la joue légèrement rougie. Tu grimaces. Tu l'as bien mérité celle-là. Quelques regards ahuris se tournent vers vous.

« Tu me prends pour une idiote comme si j'allais te croire. » Elle rage et toi tu souffres. Tu poses ta main sur ton visage pour te masser un peu. Tu te rassois avant de reprendre calmement.

« Demande-lui et s'il te dit que c'est vrai, tu te barres sans rien dire. Ok ? » Deux regards se posent alors sur le pauvre garçon. Ton regard animé par une lueur d'espoir incandescente et le sien emplie d'une rage sombre.

«  J-je ne sais pas ce que Harl' vous as fait... Mais s'il vous plait, laissez nous tranquille maintenant. Il est bien mon petit ami, e-et je voudrais que vous lui fichiez la paix ! »

Un sourire immense étire tes lèvres. Bien trop grand, bien trop satisfait de toi. De lui, ton sauveur d'un jour. La jeune femme l'observe abasourdie, piquée au vif par sa fierté piétinée. L'espace d'un instant t'as vraiment douté. T'as vraiment qu'il te laisserait t'enfoncer dans un pétrin pas croyable. Pourtant, il te défend avec un aplomb que tu ne lui avais pas imaginé à l'entente de ses petits balbutiements un peu plus tôt. C'est que t'aurais pu y croire, si tu n'avais pas été à l'origine de toute cette mascarade. Tu te redresses tranquillement, regonflé d'une nouvelle assurance. La baffe est déjà oubliée, elle n'a laissé qu'un légèrement échauffement rougeâtre sur ta joue. Son bras s'enroule autour du tien et pour accompagner son geste, tu déposes lentement ta main sur celles qui s'agrippe à toi.

«  Partez maintenant, et n-ne vous approchez plus de lui... »

Le regard pétillant, tu acquiesces doucement de la tête. Tu ne le contrediras pas, tu n'attends que ça que son joli derrière disparaisse du périmètre. Elle ouvre légèrement la bouche comme si elle venait d'essuyer une insulte. Ses joues s'empourprent de colère et de gène face aux regards extérieurs. Elle bombe le torse en se redressant avec une arrogance risible, sa bouche se tord dans une grimace peu flatteuse.

«  Pas moyen que je reste ça c'est sûr. Garde-le bien … » Elle te désigne de son doigt manucuré. « Tu devrais peut-être lui mettre une laisse, pour éviter qu'il n'aille remuer la queue n'importe où. » Un petit ricanement mesquin. « Je trouverai ça dégradant, moi. » Elle se retourne dans un mouvement de hanche exagérée, replace son sac à mon sur son épaule et sort comme si de rien n'était. Tu lâches un soupire de soulagement en laissant retomber tes mains sur tes propres cuisses cette fois-ci. Puis d'un mouvement rapide, tu te tournes vers le brun en t'appuyant nonchalamment sur la table.

«  C'est vrai qu'à la voir, tu t'doutes que le dégradant elle connait elle ! » Un petit haussement de sourcils pour appuyer ta  réflexion mesquine pour ne pas dire méchante. T'es vraiment un enfoiré, au fond c'est des gars comme toi qui rendent cela dégradant. Une nouvelle fois, tu lui lances un sourire éclatant avant de reprendre. «  Mec, merci. Tu m'as sauvé la vie, franchement quand je t'ai écouté parler … J'ai cru que j'allais t'rouler une pelle tellement t'as fait palpiter mon cœur. »

Un petit clin d'oeil taquin avant que tu n'exploses d'un rire franc. Tu lui tapotes l'épaule d'un geste amical. «  En faite, je m'appelle Harley si t'avais pas deviné et toi ? »